CDN Théâtre de l’Union

Réalisé par Stéphanie Pichon en février 2022

Le Centre Dramatique National de Limoges et son Académie de l'Union entame une nouvelle èredepuis la rentrée de septembre 2021. La metteure en scène Aurélie Van Den Daele, qui a fondé le Deug Doen Group,en a pris la direction. Elle souhaite plus d’horizontalité, plus de diversité, et imagine des collaborations artistiques fortesavec des auteurs.

Stage avec les élèves de l’Académie de l’Union dirigée par Aurélie Van Den Daelen, photo Thierry Laporte

Nouveau souffle

Ce début de saison 2021-22 était plus que chargé pour Aurélie Van Dan Daele. Elle venait d’être nommée officiellement directrice du Centre Dramatique National, Théâtre de l’Union, tout en créant sa toute nouvelle pièce Soldat·e inconnue à Paris, puis au TnBA à Bordeaux. Sa vraie rentrée à Limoges, au Théâtre de l’Union, s’est finalement faite avec la reprise, en décembre, d’Angels in America, une pièce maitresse de son Deug Doen Group. Dans une version strass et cinématographique de la pièce de Tony Kushner, la troupe pouvait donner à voir tout son savoir-faire et son univers esthétique au public de Limoges. Après des mois et des mois de crise, le Théâtre de l’Union, Centre Dramatique National, semble donc sortir la tête de l’eau. La crise interne, la prise de parole publique des équipes, et des étudiants de l’Académie, l’audit du ministère de la Culture, puis le départ de Jean-Lambert Wild qui y était directeur depuis 2015, sont donc de l’histoire passée. Aurélie Van Dan Daele n’a pas eu peur de postuler pour un théâtre qui sortait d’une double crise, sanitaire et sociale. « J’avais depuis longtemps un désir d’être associée à un espace, un territoire. La crise sociale qu’a traversée le théâtre n’a pas été un frein à ma candidature. Je savais que je serais accompagnée pour en sortir. Ce qui a fait nécessité pour moi, c’était le territoire et les forces de l’Union : son atelier de décor, de costumes, l’Académie… ».
Cette metteure en scène de 42 ans s’est formée au conservatoire de Clermont-Ferrand, puis au CNSM de Paris avant de fonder le Deug Doen Group en 2007, un groupe de travail pluridisciplinaire. Associée au Théâtre de l’Aquarium à Paris, puis au TnBA, elle cherchait depuis quelque temps un lieu où se poser.
C’est chose faite avec cette nomination, qui fait d’elle une des 19 directrices femmes de CDN, soit 46 % des directions de CDN en France. Une petite révolution puisqu’il y a dix ans les femmes ne représentaient que… 12 % des directions ! Dans une tribune parue en décembre 2021, elles s’étonnaient pourtant que ce mouvement de fond, n’ait été que « très peu commenté, comme s’il faisait lui aussi l’objet d’une étrange invisibilisation. Cela dit, nous n’avons jamais eu la naïveté de penser que nos seules nominations suffiraient à rétablir une justice et une égalité, ni celle de croire qu’au cœur d’un système profondément inégalitaire, il serait plus simple pour des femmes de transformer une longue histoire de domination et de violences. »
À l’Union, son projet compte développer l’idée de « Forêt monde » en référence au roman de Richard Powers. « Comment inventer d’autres types de spectacles dans la forêt, dans des parcs, dans d’autres lieux, des rendez-vous différents ? J’ai envie d’aller dans la forêt le soir avec les spectateurs et spectatrices, leur proposer des aventures… La crise nous a tous déplacés. »
Horizontalité, féminisation, projets participatifs, infusion du vivant, créations hors du théâtre, font partie de son projet. Pour l’accompagner, elle s’entoure d’une équipe d’auteures, artistes aux écritures plurielles, et majoritairement féminines – la metteure en scène Alice Laloy, les autrices Elsa Granat et Charlotte Lagrange, le créateur iranien Gurshad Shaheman. Elle s’appuie aussi sur les forces locales, comme les Zébrures d’automne, rendez-vous de la francophonie. « C’est une richesse incroyable que d’accueillir ces auteur·rice·s, que de pouvoir accéder à des propositions uniques et superbes. J’espère qu’on va arriver à consolider les liens. »

L’Affût : Comment s’est passée la première rencontre avec l’équipe ?

Elle a été très forte. Christophe Floderer, qui a assuré l’intérim, avait organisé une rencontre dès la candidature. Chacun des quatre candidats a pu dialoguer avec l’équipe dans son intégralité. J’ai senti une grande motivation, et que cette histoire, si elle appartenait à un passé récent, n’empêchait pas l’envie d’écrire une nouvelle page. L’équipe a été accueillante, chaleureuse.

L’Affût : Votre projet fait la part belle aux collaborations artistiques.

La coopération, la co-construction, la collaboration, ce sont des mots bateaux désormais, mais très importants pour le projet du CDN. Je voudrais essayer d’inventer des nouveaux modes de collaboration avec les auteurs et autrices, et créer les conditions pour travailler véritablement ensemble, permettre des hybridations. Et puis il faut arriver à ce qu’il y ait des nouveaux récits sur les scènes des théâtres, que le monde n’y soit pas seulement unilatéral, occidental.

L’Affût : Avez-vous déjà des projets pour l’Académie de l’Union ?

Il y a des choses à faire très concrètes, notamment pour la promotion qui sort tout juste et qui a énormément souffert du contexte. Nous allons les accompagner au mieux dans des dispositifs d’insertion, pour qu’ils aient les espaces de jouer et travailler. Je souhaite aussi prolonger cette classe ouverte sur les ultra-marins, qui est une grande richesse. Enfin, l’Académie est implantée dans un cadre exceptionnel, en milieu rural. Cette particularité doit devenir une vraie force et permettre à l’école de s’inscrire autrement dans le paysage théâtral régional, national, et international.

CDN – Théâtre de l’Union
05 55 79 90 00 – 20 Rue des Coopérateurs 87006 Limoges
billetterie@theatre-union.fr
theatre-union.fr

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