Circo Aereo

Réalisé par Marie-Agnès Joubert en avril 2017

Installé en France depuis près de quinze ans, le Finlandais Jani Nuutinen a révolutionné la manipulation d’objets.

Un cirque plus juste, Circo Aereo, photo Philippe Laurençon 

Artisan Circassien

À l’âge de 15 ans, Jani Nuutinen sillonnait déjà les routes de Finlande en tant que jongleur dans des productions professionnelles. Mais c’est la France vers laquelle il choisit quelques années plus tard, alors même qu’il a fondé Circo Aereo avec Maksim Komaro et monté deux spectacles, de mettre le cap afin de parfaire sa formation. « Il n’existait pas en Finlande d’école supérieure apte à proposer des cours de théâtre et de danse en lien avec la discipline circassienne », explique-t-il. Dès sa sortie du Centre national des arts du cirque (CNAC) en 2001, la Champagne devient pour lui bien plus qu’une terre d’adoption : une terre d’élection où, grâce aux contacts noués avec des programmateurs qui l’ont repéré dans le spectacle de sa promotion mis en scène par Philippe Découflé, il décide de s’établir et de recréer la Compagnie Circo Aereo en 2002. Un temps maintenus (Maksim Komaro et Jani Nuutinen signent entre 2004 et 2006 plusieurs spectacles, dont Super 8, I/O et Louisiana Circus), les liens avec la Finlande se distendent peu à peu, au point que les deux compagnies éponymes sont désormais des entités distinctes. Avec son premier solo, Un cirque tout juste (suivis d’Un cirque plus juste et Un cirque juste juste), Jani Nuutinen inaugure une aventure placée sous le signe du cirque d’objets, dont il repoussera constamment les limites. Exit les massues, balles ou cerceaux, outils traditionnels et attendus du jongleur. « J’ai rapidement souhaité, souligne le circassien, utiliser des objets différents, parfois issus du quotidien, ou bien d’en inventer certains qui permettent de raconter une histoire autre que celle du cirque. » Simple désir de se démarquer dans le domaine du « nouveau cirque » où les propositions sont de plus en plus nombreuses ? Plus sûrement, cet artiste atypique (dans sa dernière production, Intumus Stimulus, il aborde les rives du mentalisme) est avant tout animé par l’envie de surprendre, spectacle après spectacle, le public avec lequel il aime également dialoguer dans des univers intimistes.
Solitaire – même s’il fait parfois appel à des comédiens ou des marionnettistes – cet artisan de la piste a réussi en l’espace de quelques années à conquérir le monde, se produisant en Scandinavie, aux États-Unis ou encore à Hong-Kong. Au nomadisme inhérent au cirque, il préfère toutefois le calme de la campagne limousine, où il s’est installé voici bientôt dix ans. Son expérience d’artiste associé au Sirque de Nexon de 2007 à 2013 l’a convaincu de s’ancrer davantage sur le territoire, via des résidences, des tournées et des projets d’action culturelle plus ambitieux. En attendant, dans l’atelier qui jouxte son habitation, il continue de bricoler de nouveaux agrès et dispositifs scéniques, tel un chercheur toujours en quête de découvertes qu’il partagera ensuite avec les spectateurs.

L’Affût : Quel rapport particulier développez-vous avec le public ?

Jani Nuutinen : J’ai envie que le public, lorsqu’il entre dans le chapiteau, se dise qu’il va assister à un spectacle qu’il n’a jamais vu avant, qu’il découvre un monde inconnu de lui. Je veux retrouver et transmettre cette magie et ce mystère qui m’attiraient, enfant, vers le cirque. J’aime que la représentation soit un moment de partage avec le public, que celui-ci me voie bien, que nous vivions des moments intimes comme si je l’invitais chez moi. Le chapiteau n’est pas, à mes yeux, un espace neutre. C’est pourquoi j’accorde une attention pas uniquement à la scénographie du spectacle mais aussi à celle du lieu. J’apprécie les espaces minimalistes, le fait également de proposer des dispositifs scéniques différents : en demi-cercle, en frontal, en bi-frontal. Dans mon dernier spectacle, le public se déplace régulièrement en transportant son siège. Je souhaite aller de plus en plus vers des représentations qui s’apparentent à des happenings.

L’Affût : Proposer des formes très différentes aide-t-il à la diffusion ?

Même si ma principale motivation est de concevoir chaque fois un projet le plus original possible, proposer uniquement des solos dont certains sont joués sous chapiteau, d’autres sur un plateau de théâtre et d’autres encore dans des lieux atypiques ou chez l’habitant, constitue en effet un réel atout en diffusion. Le plus compliqué est de se déplacer avec un chapiteau, qui occasionne des frais (liés au transport, au gardiennage sur place…) jugés trop coûteux par les diffuseurs. Je suis parfois obligé de baisser au maximum les prix de cession du spectacle. Heureusement, en étant artiste associé au Sirque de Nexon j’ai pu rencontrer des programmateurs de la région qui ont accueilli mes productions. Je bénéficie aussi d’une aide à l’itinérance de la part du ministère de la Culture. L’avantage du cirque enfin est qu’il reste une discipline plus populaire que les autres, ce qui permet aux spectacles de tourner davantage que des pièces chorégraphiques, par exemple. La demande est plus importante, mais les négociations sont constantes.

Circo Aereo
06 58 95 72 11
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circoaereo.net


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