Compagnie François Godard

Réalisé par Marie-Agnès Joubert en octobre 2016

En créant le septième volet de Résistances, François Godard achève une aventure longue de dix années où s’exprime avec forcel’engagement de l’homme et de l’artiste.

Xavier Vochelle, Fran ois Godard, Pascale Berthomier, photo DR

Assis sur le rebord du monde

de son enfance passée au sein d’une communauté emmaüs, François godard a hérité le désir de défendre une culture populaire et cette capacité à porter la parole de ceux qui en sont le plus privés. pressé de s’échapper des études et des quelques cours de théâtre qu’il fréquente, il tourne très tôt comme conteur et musicien et monte dès 19 ans ses premiers spectacles. les moyens de production sont inexistants, les projets pas tout à fait aboutis artistiquement, mais l’essentiel réside ailleurs, dans cette urgence à exprimer sa vision du monde. artiste d’abord solitaire, François godard va peu à peu affirmer son goût pour la création collective et pluridisciplinaire à la faveur de deux rencontres déterminantes : celle en 1996 du harpiste Frédéric Bourgoin avec lequel il officiera pendant dix ans et fondera la compagnie l’herbe d’or (avant la sienne en 2009), puis en 2000 de la comédienne et metteure en scène hélène richard qui lui permet de confronter son art à des textes politiques de dario Fo et louis calaferte. en 2002, L’Homme d’argile, spectacle d’après L’Épopée de gilgamesh dont François godard écrit les textes et pour lequel il s’entoure d’une importante équipe (danseurs, conteurs, musiciens, comédienne et plasticiens) apparaît comme l’apogée de son parcours. « C’était l’histoire que je rêvais depuis des années de conter, explique-t-il, d’où un grand vide une fois la diffusion achevée. »
le conteur l’ignore alors, mais une aventure plus passionnante encore va s’offrir à lui quand il invente en 2006 le concept de résistances, qui le ramène aux sources de sa vocation en même temps qu’il synthétise vingt années de présence sur les planches. ce cycle fondé sur la mémoire collective rassemble en effet tout ce qui traverse le conteur depuis ses débuts : un goût pour l’épopée et le matériau mythologique, une approche transdisciplinaire des arts de la parole et surtout un engagement qu’il préfère qualifier d’artistique plutôt que de politique. « un spectacle engagé est un spectacle dans lequel un artiste se dévoile et joue avec ce qu’il est, qu’il y ait ou non un propos politique explicite », précise François godard, insistant par ailleurs sur l’importance d’une complicité artistique au long cours. chaque épisode de résistances s’écrit ainsi au plateau, dans un dialogue constant entre le conteur-auteur et ses fidèles musiciens-compositeurs pascale Berthomier et Xavier Vochelle.
des mutineries de 1917 aux attentats de 2015 en passant par les congés payés, la seconde guerre mondiale ou la guerre d’algérie, François godard aura ausculté dix ans durant les soubresauts du monde et la capacité de l’être humain à s’y soumettre ou à se révolter. un incroyable pari, bien accompagné en production mais pas toujours soutenu par les diffuseurs ; ceci, alors même que la compagnie investit le secteur du théâtre et très peu celui du conte, dont François godard regrette qu’il soit insuffisamment reconnu et valorisé. « on attend du conteur qu’il fasse du lien social et apporte du rêve mais pas un travail d’artiste, conclut-il. or, il faut encore et toujours parler d’artistique. »  

L’Affût : Vous avez présenté Résistances 7. Au présent dans le Off d’Avignon. Quel bilan tirez-vous ?

François godard : le off est un marché où il faut se battre pour montrer que son spectacle est le meilleur, ce qui est absurde. s’y produire est toutefois nécessaire lorsqu’on souhaite être par la suite programmé dans certains lieux. ma participation il y a deux ans avait déclenché très peu de diffusion ou de coproductions mais m’avait fait comprendre qu’il faudrait revenir. il est encore trop tôt pour prédire les retombées puisque nous recontacterons les programmateurs à l’automne. À avignon, on se trouve face à un public d’habitués, très homogène sur le plan de l’âge et des catégories socio-professionnelles. l’écoute n’est donc pas la même. participer au off présente toutefois un grand avantage, celui de permettre au spectacle de progresser, puisqu’on le joue tous les soirs. c’est particulièrement important pour une création comme résistances 7 qui n’avait été présentée que cinq fois avant avignon.

L’Affût : Avec ce dernier volet de Résistances s’achève une aventure de près de 10 ans. Que ressent-on lorsqu’une telle page se tourne ?

Je ne considère pas qu’une page se tourne car mon objectif est que ce spectacle poursuive sa diffusion. cependant, au moment d’écrire le spectacle nous avons tous eu conscience qu’il s’agissait du dernier et qu’il n’y aurait pas d’épisodes suivants pour tenter des choses nouvelles. nous arrivons au terme de ce chantier avec notre vécu, les héros des différents spectacles, une culture liée à la mémoire ouvrière et révolutionnaire, ce qui peut peser sur nos épaules. Je ne songe pas encore aux prochaines productions, simplement au fait que cet ultime volet soit à la hauteur de l’aventure. depuis dix ans, nous vivons et jouons ensemble, nous avons parcouru des milliers de kilomètres et subi parfois des échecs. J’ai également connu avec le public des moments d’une rare intensité que je n’avais jamais éprouvés avec d’autres répertoires. les échanges ont été d’une richesse et d’une profondeur incroyables

Compagnie François Godard
06 76 92 97 57
contact@francoisgodard.com
cycleresistances.free.fr

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