Compagnie Jizō

Réalisé par Sarah Le Blé en février 2022

Jizō est une jeune compagnie créée par la metteuse en scène Laura Vélia, qui articule son travail autour du corps en mouvement,tout en restant toujours à l’écoute de son public.

Compagnie Jizō, Laura Vélia, photo LeStudioSansMur

Tout mon travail s’articule autour du corps et du mouvement

Laura Vélia se forme au Théâtre du Jour d’Agen pendant trois ans (jusqu’en 2015), auprès du très inspirant Pierre Debauche, fondateur du Théâtre de Nanterre, qui lui révèle notamment que la confiance est la pierre angulaire de tout projet : « Je pars de ce que le comédien accepte de me donner, ce qui me permet de rebondir sur la matière, la créativité des acteurs, les espaces inédits qui s’ouvrent avec l’échange… », résume la metteuse en scène.
S’initiant au travail de création « de A à Z », la jeune femme originaire du Nord-Pas-de-Calais décide de créer son réseau professionnel autour de Bordeaux, où elle intègre le cycle 2 du Conservatoire. Elle y monte la compagnie Jizō avec deux camarades de promotion, dans l’idée de « faire perdurer le travail et l’esprit de Pierre Debauche », qui souhaitait faire résonner le théâtre dans les milieux ruraux. « J’ai pu travailler sur différentes formes, du cabaret aux pièces classiques. Au Conservatoire de Bordeaux, en 2018, j’ai saisi l’opportunité qui m’était offerte d’écrire une pièce de commande dans le cadre d’un jumelage avec le lycée français d’Alicante. Cette expérience a été fondatrice dans mon approche de la mise en scène. » Laura Vélia a en effet dû diriger des non comédiens de 4 ans à 79 ans (car était concerné le réseau gravitant autour du lycée) tout en inscrivant son travail en écho à des installations d’art contemporain : « Danseurs et musiciens amenaient le public vers le musée d’art contemporain, où chaque élève s’installait devant le tableau de son choix. »

« Théâtre médico-social »
Pour la première pièce signée de la compagnie Jizō, elle décide d’aller à la rencontre d’un public assez éloigné du spectacle vivant : celui des personnes âgées dépendantes en établissement spécialisé (les Unités de soins longue durée). Partant de l’idée que la pièce a perdu son metteur en scène, les comédiens (Laura Vélia et Vincent Di Santo) invitent les spectateurs à venir combler ce manque. « Nous sommes d’abord allés échanger avec les résidents pour nous imprégner de leur culture et leurs références, pour ensuite distiller ces éléments dans le spectacle. Tous étaient hyper investis, car leur regard était pris en compte, c’était très valorisant pour eux. »
S’appuyant totalement sur les principes du théâtre médico-social, la compagnie Jizō espère ainsi faire tourner ce projet dans d’autres établissements spécialisés, car les effets bénéfiques sont immenses pour les « spectateurs-acteurs » : « Certaines personnes atteintes d’Alzheimer ont pu exprimer des émotions ! » raconte Laura en expliquant que ce type de théâtre est fortement apprécié non seulement des résidents, mais du personnel et des familles. D’autres projets sont d’ailleurs en cours de réalisation à Pessac autour de l’idée d’ateliers-théâtre, sur le même principe de participation active du public. Laura Vélia est également l’autrice d’une autre pièce, écrite lorsqu’elle était encore étudiante au Théâtre du Jour et mise en scène au cours d’une résidence de deux semaines à Langon. Il s’agit cette fois d’une quête (d’un ballon) de part et d’autre d’un mur, ce dernier étant « un personnage à part entière ». Le spectacle intègre des marionnettes, des masques et procède beaucoup par mises en abyme, avec des « effets papillon en boucle infinie ».
Pour l’heure, ce sont des contes et un spectacle cabaret que la compagnie joue en ce début d’année à la Guinguette du Vieux Chêne, à Tauriac, au nord de Bordeaux.

L’Affût : Pourquoi Jizō ?

Les statuettes Jizō sont, au Japon, des moines qui guident vers la lumière. Je n’ai pas cette prétention mais j’espère amener le public au moins jusqu’au rire ! Je suis très sensible à la culture asiatique, qui compte énormément de démons très organiques. Je m’en inspire beaucoup dans mon travail de mise en scène, en particulier en ce qui concerne la plastique, comme la confection de masques.

L’Affût : Comment résumeriez-vous votre approche de la mise en scène ?

Tout mon travail s’articule autour du corps et du mouvement. Dans mes cours de théâtre, il peut se passer des mois avant que je donne du texte à mes élèves. Je leur propose avant tout beaucoup d’exercices sur le corps : c’est capital, à mon sens, d’avoir pleinement conscience de toutes les parties du corps. Ensuite, je garde en tête la vision de Pierre Debauche, qui n’avait de cesse de répéter, lorsqu’il était mon professeur de théâtre, que « l’on est débutant à chaque nouveau projet ».
Enfin, je considère que chaque pièce prend forme aussi avec le public. C’est pourquoi « Le Mur », que je souhaite faire davantage connaître en montant la pièce à différents endroits, pourra évoluer selon le public qui vient la voir.

L’Affût : Quels sont vos projets pour 2022 ?

Je prépare un spectacle pour enfants à partir de contes africains, russes et asiatiques, en collaboration avec la comédienne Julie Lagnier. Sur ce projet, je m’occupe de la confection des masques et des marionnettes et Julie écrit les textes. Nous avons prévu de jouer le spectacle dans les cafés-théâtres de Bordeaux, surtout cet été. Je vais par ailleurs démarrer des ateliers théâtre autour de Bordeaux.

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