La Métive

Réalisé par Marie-Agnès Joubert en juillet 2017

En l’espace de 15 ans, La Métive est devenu un lieu de fabrique artistique repéré bien au-delà des frontières régionales.

La Métive à Moutier d’Ahun, photo La Métive ; Delphine Ciavaldinie, Happilly ever after, 2013, photo Pierre Alexis Ciavaldini

Des résidences pluridisciplinaires en milieu rural

Lorsque Karine Halpern et Christophe Givois, issus du théâtre, décident de s’installer début 2002 dans la Creuse, leur aventure s’apparente à un retour aux sources. La première y a des attaches familiales, le second y a travaillé à ses débuts, et tous deux se sont promis de bâtir un jour un projet artistique sur ce territoire. Au fur et à mesure de leur immersion dans le village de La Celle-Dunoise, les contours de leur action se précisent : elle consistera, au sein de l’association La Métive, en des résidences de création pluridisciplinaire ; un axe très novateur à l’époque et ambitieux en zone rurale. D’abord nomade, le projet s’ancre en 2007 à Moutier d’Ahun (169 âmes), dans un ancien moulin dont la municipalité leur ouvre les portes. « Le maire et une partie de la population rêvaient depuis des années de voir le moulin transformé en un atelier d’artistes », précise Christophe Givois, directeur artistique de La Métive. Dans une joyeuse improvisation, artistes et habitants aménagent le lieu avec des meubles récupérés ici et là. L’accroissement de l’activité va toutefois convaincre les partenaires publics (Commune, Communauté de communes, Département, Région, État et Europe) de la nécessité de réhabiliter le moulin.
Depuis 2012 ainsi, La Métive dispose d’un outil de 400 m2 qui abrite une salle d’exposition, un atelier dédié aux plasticiens, un studio de danse muni d’un plateau et trois pièces utilisables par des auteurs ou des photographes. Chaque année, elle accueille en résidence (d’une durée de trois semaines à trois mois) sept projets, au stade de l’écriture – chorégraphique, musicale, scénaristique, photographique… L’agencement des espaces favorise une grande porosité entre les artistes, qui échangent sur leurs créations, voire initient des collaborations. Grâce à ses nombreux « correspondants » spécialisés dans chaque discipline, La Métive suit de près les projets et mise sur son réseau conséquent (qui compte plusieurs centres dramatiques nationaux, festivals, scènes nationales, centres d’art contemporain…) pour permettre aux artistes de solliciter d’autres résidences et de créer dans des lieux repérés, à l’échelon départemental, régional et national. Les programmateurs peuvent aussi découvrir le travail des artistes lors des Festives, en octobre. Si on ajoute à cela une importante action culturelle et des rencontres-débats, on comprend mieux que Christophe Givois juge le budget de 100 000 € (abondé à 80% par des subventions) insuffisant. Il aimerait en effet accompagner les artistes plus longtemps et mieux, mais aussi ouvrir davantage encore le lieu à des associations et aux publics. Autant de vœux qu’il ne manquera pas de formuler en soufflant cet automne les 15 bougies de La Métive. Car, conclut-il, « il s’agit surtout de fêter les années à venir ».

L’Affût : Qu’avez-vous mis en place pour soutenir l’émergence ?

Christophe Givois : Nous avons noué un partenariat avec La Maison du film à Paris, qui sélectionne chaque année des scénarios et courts-métrages. Le scénariste ou le réalisateur primé par nous bénéficie de trois semaines de résidence pour ébaucher l’écriture de son second projet. Par le passé, nous avons également accueilli plusieurs jeunes chorégraphes adressés par la chorégraphe et ancienne directrice du Centre national de danse contemporaine (CNDC) d’Angers, Emmanuelle Huynh, qui fut notre première résidente danse en 2003. Notre correspondante en danse travaille avec Maud Le Pladec au Centre chorégraphique national d’Orléans sur le repérage de jeunes talents, et notre correspondante photo s’est rapprochée de la Villa Pérochon, Centre d’art contemporain photographique de Niort, dont nous recevrons probablement de jeunes artistes lors de workshops. Nous avons aussi contacté l’Académie de l’Union à Limoges, l’École nationale supérieure d’art de Limoges (ENSA) et l’École supérieure de théâtre Bordeaux Aquitaine, afin qu’elles informent leurs élèves des possibilités de résidences à La Métive. Notre lieu étant connu pour favoriser la consolidation des projets, nous jugeons important d’en faire bénéficier les artistes émergents.

L’Affût : Comment s’établit le lien entre les artistes en résidence et le territoire ?

Lors des premiers entretiens avec les artistes, nous définissons leurs besoins et les interlocuteurs susceptibles d’enrichir leur projet. Nous recherchons ensuite les structures, examinons si des actions sont possibles et sous quelle forme. Ce peut être des échanges au cours d’une soirée, la présentation d’étapes de travail ou des ateliers de pratique artistique, mais toujours en lien avec le projet et destinés à le servir. La chorégraphe Ana Rita Teodoro, par exemple, a souhaité travailler avec un Institut médico-éducatif (IME). Des jeunes de l’IME l’ont rencontrée à plusieurs reprises et elle a chorégraphié des pièces pour eux qui ont donné lieu à une présentation publique à laquelle s’est jointe la structure de production Quartier rouge, accueillie au même moment en résidence avec le projet de performance Feralia. Ce genre de partenariat entre une chorégraphe, un IME, une structure professionnelle de spectacle vivant et des publics conviés à une soirée est idéal.

La Métive
2, rue Simon Bauer 23150 Moutier-d’Ahun
05 55 62 89 76 – 06 67 30 13 67
lametive@lametive.fr – lametive.fr

Partager