Le Carré-Colonnes

Réalisé par Marie-Agnès Joubert en octobre 2017

La fusion du Carré et des Colonnes porte ses fruits en matière de renouvellement des esthétiques et d’élargissement des publics.

Le Carré, photo DR

Un lieu dédié aux nouvelles écritures

En 2008, les Villes de Saint-Médard-en-Jalles et de Blanquefort ont souhaité mutualiser leurs équipements respectifs (Le Carré et Les Colonnes) afin de créer l’EPCC Carré-Colonnes, appelé à rayonner sur l’ensemble de la Métropole bordelaise. Selon sa directrice Sylvie Violan, l’enjeu était, tout en respectant l’identité propre à chaque lieu (la création contemporaine pour Le Carré, une tonalité jeune public et théâtre de rue dans le cas des Colonnes), de diversifier les esthétiques proposées et donc les adresses au public. Désormais scène conventionnée au titre de la création, Le Carré-Colonnes se singularise par un fort attachement aux formes nouvelles (écriture de plateau, créations dans l’espace public voire participatives), souvent transdisciplinaires par essence. « Nous ne définissons plus les spectacles par genre ni discipline, et présentons très peu de répertoire », explique Sylvie Violan, justifiant aussi ce choix par l’existence à Bordeaux d’un Opéra et du TNBA orienté vers le théâtre et la danse. L’autre ressort, capital, de la mutualisation est de réussir à attirer un public plus large que celui des deux anciennes structures et du festival L’Échappée belle. Sa directrice a ainsi réduit drastiquement le nombre de spectacles, afin de pouvoir effectuer des séries de 5 ou 6 représentations. Le pari est à l’évidence remporté, puisque Le Carré-Colonnes a enregistré en quelques années un boom de sa fréquentation, passant notamment de 800 abonnés à plus de 2 000.
Cette exploitation plus longue des créations profite également aux artistes, qui peuvent en outre compter sur le soutien du Carré-Colonnes dès la phase de production. Chaque saison, celui-ci accueille une dizaine de compagnies (dont deux tiers de la région) lors de résidences systématiquement assorties d’une coproduction en numéraire. Par ailleurs, Le Carré-Colonnes agit en qualité de producteur délégué pour de petites formes « tout-terrain » destinées à s’implanter en n’importe quel endroit (écoles, salles des fêtes…) du territoire. « La question du hors les murs est importante pour tisser du lien avec ceux qui ne peuvent venir au théâtre », souligne Sylvie Violan. Plus globalement, la directrice se félicite que la fusion n’ait pas rimé avec diminution des moyens, mais ait au contraire permis à deux lieux qui peinaient parfois à trouver leur public de gagner en attractivité. Ce succès doit aussi beaucoup à l’esprit du lieu (« mettre les artistes et leurs propositions au cœur du projet ») et cette capacité à réinventer sans cesse les modalités de la rencontre entre l’œuvre et ses destinataires : en salle, en extérieur, dans l’espace public et même sur des bateaux… Le projet territorial que Le Carré-Colonnes s’apprête à développer dans le Médoc, isolé sur le plan culturel, en fournira bientôt une nouvelle illustration.

L’Affût : 40% des compagnies que vous programmez viennent d’Europe et d’autres régions du monde. Pourquoi ce choix ?

Sylvie Violan : J’ai engagé depuis longtemps ce travail sur l’international qui est une façon pour moi d’ouvrir une fenêtre sur d’autres cultures, sur des écritures ou des esthétiques que nous n’avons pas forcément en France, de proposer aussi des spectacles surtitrés. D’où le qualificatif « scène cosmopolitaine » accolé au lieu. Cette ouverture a été appréciée des publics, car lorsque j’ai commencé à programmer des artistes étrangers, les propositions internationales n’étaient pas très nombreuses à Bordeaux. Nous avons reçu des compagnies suisses, belges, colombiennes, libanaises… L’accueil d’artistes étrangers implique d’autres façons de faire, mais l’équipe du Carré-Colonnes s’y est formée progressivement et dispose de toutes les compétences. Sur un plan financier, on peut rarement le faire seul. Il est nécessaire de s’inscrire dans des tournées internationales, et des aides spécifiques existent. C’est un axe important du projet, renforcé aujourd’hui dans le cadre du Festival international des arts de Bordeaux métropole (FAB).

L’Affût : Justement, vous co-dirigez depuis l’an passé le FAB. Comment ce festival s’articule-t-il à l’activité du lieu ?

Comme auparavant le festival Des souris et des hommes qui a eu lieu de 2008 à 2015, le FAB est intégré à la saison, en octobre. Co-organisé par Le Carré-Colonnes et l’association bordelaise FAB, il se déploie sur l’ensemble de la Métropole, avec 33 spectacles proposés dans une quarantaine de lieux différents. Une dizaine est présentée à Blanquefort et à Saint-Médard. Le FAB permet d’offrir un focus international, mais aussi régional puisqu’un tiers des créations émane de compagnies de la Nouvelle-Aquitaine. L’idée est d’impulser une forte dynamique dès le début de la saison sur le territoire de Blanquefort Saint-Médard, de faire connaître des formes contemporaines à des festivaliers qui ne viendraient pas forcément au Carré-Colonnes dans l’année. Nous espérons qu’ils auront ensuite envie d’approfondir cette découverte durant la saison.

carrecolonnes.fr

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