Le Florida

Réalisé par Marie-Agnès Joubert en avril 2018

Depuis 25 ans, la Scène de musiques actuelles (SMAC) défend un projet culturel de proximité, en co-construction avec le territoire.

Le Florida, photos Plon

Un projet humaniste

Music-hall des années 30 jusqu’en 1970 puis reconverti en cinéma, Le Florida doit à une femme, Marie-Thérèse François-Poncet, d’avoir été la première scène dédiée aux musiques actuelles en France. Au tout début des années 80, alors que les banlieues s’enflamment (notamment aux Minguettes, près de Lyon), cette visionnaire perçoit la nécessité d’offrir aux jeunes des espaces d’expression. Avec la complicité de Philippe Berthelot, qui sera le premier directeur du Florida en 1993, elle conçoit un projet résolument tourné vers le territoire et ses populations. C’est cet héritage que Gabrielle Rossi, co-directrice depuis fin 2009 avec Florent Bénéteau, s’emploie à faire fructifier, tout en veillant à ce que le projet « évolue au regard des enjeux sociétaux actuels ». Aujourd’hui, le lieu s’articule autour d’une salle de concert de 750 places, quatre studios de répétition, un espace bar et, depuis 2010, le Studio 5 dédié aux pratiques numériques. La programmation, d’une trentaine de concerts chaque saison, revendique un grand éclectisme (du rock jazz à la musique contemporaine, en passant par les musiques du monde et l’électro) ainsi qu’une attention soutenue à l’émergence. Outre accueillir ainsi de jeunes artistes en résidence, la SMAC – labellisée au cours des années 90 – organise des « scènes ouvertes », où des groupes amateurs locaux ont la possibilité de se confronter à un public.
L’essentiel de la mission se concentre sur l’action culturelle, aux déclinaisons multiples : ateliers sur le numérique, cours de musique, interventions en milieu scolaire (donnant parfois lieu à des créations), dans des Instituts médicaux-éducatifs ou encore en prison. Aussi et surtout, l’Association pour le développement de l’expression musicale (Adem) qui porte le projet reste très attachée à la notion de co-construction avec le territoire ; qu’il s’agisse des initiatives menées dans le cadre de l’action culturelle comme de la participation des habitants à l’activité de l’association. « Nous portons un projet humaniste, explique Gabrielle Rossi, les musiques actuelles étant un levier pour œuvrer à un mieux vivre ensemble. » C’est pourquoi Le Florida, lieu de diffusion et de pratique artistique, tient également à être un lieu de vie, où les publics peuvent se rencontrer et débattre sur des sujets très divers. Une ambition renforcée par le statut d’Entreprise solidaire d’utilité sociale de l’Adem. Les baisses de subventions des deux dernières années ont engendré cependant un déséquilibre structurel. Gabrielle Rossi regrette que la Ville et le Département ne soient pas plus attentifs au travail de terrain mené par l’équipe, « les élus ne jurent que par les têtes d’affiche. Ils accordent plus de reconnaissance à un festival comme Garorock qui en trois jours génère une programmation et une fréquentation conséquentes, qu’à un projet comme le nôtre qui œuvre tout au long de l’année ». Loin toutefois de se résigner face aux difficultés financières qu’elle traverse, l’Adem a décidé cette année de revoir son mode d’organisation du travail, sur le modèle de l’entreprise libérée. Preuve qu’après 25 ans d’existence, elle est encore en capacité de se renouveler.

L’Affût : L’Adem qui gère le Florida a obtenu un agrément Jeunesse et Éducation populaire. En quoi cela influence-t-il son projet ?

Gabrielle Rossi : C’est avant tout une reconnaissance du fait que les valeurs que nous défendons correspondent véritablement à celles de l’Éducation populaire. L’important, à mes yeux, est la sensibilisation des publics, la transmission d’un savoir être, le respect de l’autre, d’être actif aussi sur des questions sociétales qui sont un peu abandonnées aujourd’hui. Nous souhaitons que l’Adem soit un espace où chacun puisse s’exprimer afin de s’émanciper et surtout construire son identité. En 2007, nous avions organisé des rencontres intitulées Les Arbres à palabres où étaient abordés des thèmes politiques. Nous aimerions aujourd’hui les relancer. Nous le faisons déjà à travers L’Atelier créatif de développement collaboratif (ACDC) sur des sujets liés au développement durable mais aussi à la société. Nous sommes aussi très concernés par la question des droits culturels et participons au processus mis en place par la Région sur ce sujet avec Jean-Michel Lucas.

L’Affût : L’association est également reconnue comme Entreprise solidaire d’utilité sociale. Que permet cet agrément ?

De reconnaître que le projet porté par l’Adem est un projet d’intérêt général relié à l’économie sociale et solidaire et de solliciter des fonds solidaires, comme ceux d’Aquitaine Active, par exemple. En outre, dans le cadre du Club d’entreprises que nous avons créé (Exploreur) il y a quelques années, cet agrément nous a permis d’obtenir auprès de la Direction des finances publiques que les entreprises qui souhaitent nous aider, au titre du mécénat, puissent bénéficier d’une déduction fiscale. L’agrément constitue une opportunité de nous ouvrir à des entreprises privées, pas seulement pour récolter des financements, mais pour apprendre à nous connaître et nous enrichir mutuellement de nos façons de travailler.

Le Florida
95 Bd Carnot 47000 Agen
05 53 47 59 54
le-florida.org

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