Mon métier : chargé de diffusion – Samuel Suire

Réalisé par Marion Ecalle en juillet 2021

Ce numéro de l’Affût vous invite à faire connaissance avec Samuel Suire,chargé de diffusion pour La Compagnie La Chaloupe (Niort).Il nous raconte son métier, comment il l’exerce et comment il se projette.

Miligram, Cie La Chaloupe avec Florent Picard dirigé par Sébastien Coutant, photo La Chaloupe

L’Affût : Décrivez-nous votre poste ?

Samuel Suire : Je suis chargé de diffusion, la partie la plus importante de mon travail consiste à vendre des spectacles. J’ai fait le choix de le faire, en tant que salarié, au sein de La Compagnie La Chaloupe, qui a bientôt 40 ans.
La notion de valorisation du parcours est importante. Plus que de vendre les spectacles, je participe à valoriser la compagnie, à la rendre plus lisible.
Dans notre profession, certains préfèrent le terme de chargé de développement qui inclut une notion d’ampleur. Pour ma part, j’assume le terme de diffusion, car j’aime l’idée de diffuser, de propager. J’ai axé mon travail sur la fidélisation de nos partenariats et non pas sur la recherche de clients. Certes, je prospecte, je suis présent sur la plupart des rendez-vous professionnels, je prends des contacts, j’envoie des devis.
Le réseau, c’est la base de notre métier. Celui que nous avons construit avec la compagnie est en phase avec leur projet artistique et avec mes valeurs ; c’est un réseau d’éducation populaire. On y trouve un lien de proximité avec les spectateurs et les organisateurs, un lien de terrain. Certains organisateurs ne font pas que de la diffusion de spectacle, ce n’est pas leur cœur de métier. J’aime ce genre de partenariats : nous échangeons et nous travaillons ensemble à la mise en place des projets.

L’Affût : Quel est votre parcours ?

Je viens du secteur de l’industrie, j’étais chaudronnier et responsable qualité. En parallèle j’ai toujours gravité dans le milieu artistique, j’ai fait du théâtre depuis le collège. Petit à petit j’ai eu des amis qui sont devenus comédiens professionnels, et lorsque j’ai été licencié économique j’en ai profité pour faire une reconversion. Je ne me sentais pas prêt à devenir artiste mais la partie administrative me plaisait. J’ai donc fait plusieurs formations et un de mes formateurs m’a conseillé de choisir entre production et diffusion du spectacle. J’ai choisi la diffusion. J’ai sollicité plusieurs compagnies niortaises pour savoir si elles avaient besoin de quelqu’un. J’ai d’abord travaillé pour 4 compagnies, puis 3, puis 2 et enfin une seule. Je suis salarié permanent et c’est ce qui me plaît, car j’accompagne la compagnie sur le long terme. Cela fait 10 ans que je suis chargé de diffusion. Je privilégie les relations durables dans mon métier.

L’Affût : Qu’est-ce qui vous plaît dans votre métier ?

Surtout ce qu’il y a avant un spectacle. Mais aussi le lien. La notion du faire ensemble, la relation avec les personnes. Ce qui me plaît, à mon échelle, c’est l’impact social que cela peut avoir de diffuser des spectacles. Être dans la culture est une démarche politique, ce n’est pas neutre, quel que soit le spectacle. La diffusion dans des lieux improbables, dans des quartiers spécifiques, là où on ne nous attend pas, c’est motivant… car on propose une alternative à créer des opportunités pour des personnes qui n’auraient pas forcément imaginer voir une pièce de théâtre. Cela me plaît aussi de créer des projets avec des gens qui sont sur la même longueur d’onde. C’est valorisant.

L’Affût : Un projet à partager ?

Nous sommes sur la dernière ligne droite de la production de notre nouvelle création : Hélix, spectacle qui va se créer entre septembre 2021 et mars 2022.
C’est un gros projet en partenariat avec la Ligue de l’enseignement des Deux-Sèvres mais aussi celles de Gironde, de Corrèze et de la Vienne auxquelles sont associés leurs propres partenaires. Les Landes et la Dordogne sont aussi présents pour la diffusion, c’est donc un projet qui va aller partout sur le territoire régional. Lorsqu’on fait des réunions de travail, on est une dizaine autour de la table (en visio) et on partage une envie commune qui va au-delà du projet artistique.
Ensemble, nous allons créer et diffuser le spectacle Hélix, mais nous allons aussi construire un gros projet d’action culturelle avec des écoles des territoires. C’est pour ça que je dis que je ne suis pas un marchand. Nous construisons ensemble.

L’Affût : Comment vous voyez-vous dans 10 ans ?

J’espère que je travaillerai toujours et que je ferai le même métier.
Vu la profusion de propositions et l’état de l’économie actuelle, j’envisage vraiment de centrer encore plus la diffusion sur les liens tissés, sur du long terme.
Nous dépendons aussi beaucoup des résultats des prochaines élections. Une présidence défavorable pourrait avoir une incidence sur les financements de la culture et sur certaines créations. Nous avons par exemple un spectacle qui aborde les préjugés contre les migrants, pas sûr que cela plaise à certains partis. Les financements peuvent changer mais cela ne va pas nous museler, je le redis, la culture est éminemment politique et elle peut aussi être un mouvement d’opposition.


Crédits photos :
Portrait Samuel Suire

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